Le « dispositif concours », thèse de Sofia Hachemi

Sofia Hachemi, membre du réseau Recherche avec, a soutenu le 13 décembre 2024 à CY Cergy Paris Université une thèse de doctorat en sciences de l’éducation et de la formation, réalisée sous la direction de Gilles Monceau. Cette recherche s’intéresse au « dispositif concours » et aux pratiques de recrutement par concours dans l’Éducation nationale en France, pratiques qui se déploient dans ce qu’elle désigne par le « dispositif concours ». Elle s’appuie sur le cas du concours de conseiller principal d’éducation (CPE), métier qu’elle a exercé pendant près de 15 ans.

Le « dispositif concours » est travaillé à partir de l’expression du vécu des acteurs (recruteurs et candidats), afin de comprendre comment leur statut, leur position, leurs croyances, leurs valeurs personnelles et professionnelles affectent leurs pratiques.

La recherche montre que le dispositif concours combine à la fois des fonctions techniques, politiques et sociales et qu’il n’est pas réductible à sa dimension matérielle (son organisation) et à ses finalités administratives (recruter des agents). Il s’agit aussi de prendre en compte les logiques institutionnelles dans lequel il s’inscrit. Les logiques sélectives, les logiques concurrentes et les logiques gestionnaires sont révélatrices des rapports de pouvoir qui traversent le concours et qui sont parties prenantes du processus d’institutionnalisation du dispositif. Celui-ci s’est construit au carrefour de logiques contradictoires, celles promouvant une idéologie fondée sur le principe d’égalité et de mérite, et celles venant renforcer les inégalités scolaires préexistantes.

La recherche s’est appuyée sur trois corpus de textes et des entretiens individuels et collectifs avec un ensemble de personnes participant à la conception et à la mise en œuvre des concours, et avec des étudiants candidats. L’approche socio-clinique institutionnelle a consisté à faire dialoguer tous ces matériaux dans une double perspective : comprendre, à partir du point de vue des acteurs, comment se construit le concours (cerner les pratiques de recrutement par concours) et entendre ce que les étudiants candidats disent de ces pratiques. Il s’agissait de faire émerger les significations que recruteurs et candidats donnent au concours, en passant par une analyse collective de la commande. L’approche socio-historique était donc aussi mobilisée pour mettre en perspective la problématique actuelle du concours avec le contexte socio-historique de son émergence.

Le concours est pris dans les interférences entre des logiques d’acteurs, professionnelles, idéologiques, éthiques, qui entrent en résonance ou en contradiction avec les logiques institutionnelles, politiques, sociales, organisationnelles. Ce sont ces logiques parfois contradictoires, ces tensions, que le dispositif socio-clinique s’est employé à faire émerger, l’une de ces tensions résidant notamment dans l’écart entre les prescriptions du concours préparé par les candidats et la réalité du métier vécu dans les établissements ; ou encore celles résidant dans la confrontation entre les temporalités politiques, inscrites dans les commandes, et les temporalités de la formation et de la professionnalisation.