La critique sociale comme pluralité d’engagements, d’actions et de réflexions

En 2008, nous est apparu, à l’ACSALF (Association canadienne des sociologues et anthropologues de langue française), le sentiment d’urgence de réfléchir à la critique sociale […] à force d’entendre qu’elle n’existait plus et qu’on vivait désormais dans une société démissionnaire et démobilisée.

Suite à ce colloque de réflexion sur la critique sociale, « Obstacles, tremplins et mutations de la critique sociale », nous, (Marguerite Soulière, Karine Gentelet et Gabriela Coman) avons conçu et dirigé un ouvrage qui paraîtra en ligne en décembre, sur le site de l’ACSALF. Il sera également accessible sur le site des Classiques des sciences sociales dès le début de 2015.

Billet Marguerite_DEC2014

Voici quelques extraits de son introduction :

Force est de constater que, tandis que l’idée de démocratie était présentée comme s’étiolant sous des impératifs de croissance économique et de sécurité, elle a resurgi pourtant impérativement presque partout dans le monde. Notre quotidien globalisé inclut désormais les images de générations courageuses, révoltées d’être ignorées, décidées à bousculer les configurations politiques et économiques existantes et à travailler pour bâtir des sociétés dont les principes de base reposent sur la justice sociale, l’égalité, l’inclusion et la démocratie.

Ces nouvelles formes de critique sociale de masse se sont déployées à la suite de décisions des gouvernements. Elles ont rapidement rassemblé une grande diversité de personnes concernées ou touchées par leurs effets sociaux, économiques, politiques ou environnementaux. L’engagement ne se superpose plus toujours à un projet politique concerté et structuré, ces mobilisations populaires n’étant pas nécessairement le fruit ou le signe d’un engagement continu et quotidien pour une cause. Les actions sont devenues plus ciblées, ponctuelles et surprenantes de par l’ampleur de la mobilisation ou la ferveur de celles et ceux qui s’y engagent. Comment expliquer ces particularités, au-delà d’en faire le constat ? Quelles directions privilégier dans nos réflexions quant à ces phénomènes?

Avec cet ouvrage, qui résulte d’une série d’interventions lors du colloque, et aussi, d’entrevues avec des artistes engagés pour la justice sociale, des travailleurs communautaires en éducation populaire, des intellectuels engagés au Canada et en Argentine, nous proposons

de possibles réponses en suggérant de nouvelles pistes d’analyse et de compréhension de la critique sociale, telle qu’elle se présente aujourd’hui. Nous partons de l’idée que la critique sociale ne peut être pensée ni analysée en dehors d’un temps, d’un contexte, d’une conjoncture sociale et politique. Les postures nostalgiques existantes nous confinent à une lecture statique, linéaire et normée de ce que fut, n’est plus et devrait être la critique sociale. Elles ne sont pas utiles pour saisir la diversité de ses thèmes et modalités d’expression, de ses lieux et de ses enjeux.

Car, selon nous,

la critique sociale contemporaine relève de processus qui s’articulent et se déploient dans les interstices d’un pouvoir particulier; parfois dans des espaces qui résonnent et des moments stratégiques; parfois subtilement, presque silencieusement, sur une toile, une scène ou dans un livre, par une simple inflexion du regard posé. Ces formes de critique sociale ne sont pas dénuées de risques; elles exposent davantage les acteurs qui doivent faire face individuellement à la réception de leur prise de position et de leur engagement.

Notre approche consiste à inverser la démarche classique de recherche sociologique en partant, non plus de l’appareillage théorique consacré de la critique sociale, mais de la réalité telle que décodée et identifiée par les acteurs eux-mêmes comme étant de la critique sociale. Elle suit les pratiques collectives qui se constituent en réponse aux pressions institutionnelles de règlementation et de contrôle du social. Si certaines formes sont visibles et facilement identifiables, d’autres sont plus silencieuses, en filigrane, presque invisibles.

L’ouvrage paraîtra en décembre 2014 et nous vous tiendrons au courant de sa parution.

Citations extraites de :

Soulière, M., Coman, G. et K. Gentelet, 2014 (sous presse), «Introduction. La critique sociale comme pluralité d’engagements, d’actions et de réflexions » : 9-16, in Soulière, M., Gentelet, K. et G. Coman (dir.), Visages contemporains de la critique sociale. Réflexions croisées de la résistance quotidienne. Montréal, Éditions de l’ACSALF.

Crédit-photo : Karoline Truchon.

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POUR REJOINDRE LES AUTEURES :

Marguerite Soulières, professeure

École de service social, Université d’Ottawa

marguerite.souliere@uottawa.ca

Karine Gentelet, coordonnatrice

Laboratoire de cyberjustice, Université de Montréal

karine.gentelet@umontreal.ca

Gabriela Coman, stagiaire postdoctorale

Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain/

Laboratoire d’anthropologie urbaine, CNRS-EHESS

Centre canadien d’études allemandes et européennes Université de Montréal

gabriela_coman@hotmail.com

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